La menace comique

le 01/01/1970 à 01h 33min 29s

-Mais je vois qu’en face de moi se tient un malade, un dégénéré de la campagne, parce qu’il y a bien une chose évidente ici, c’est qu’un homme sain, et quand je dis sain, j’entends pas non plus une lumière, non, juste le brave gars qui comprend que s’il baille c’est qu’il veut dormir, un gars sain d’esprit quoi ! et ben lui, il aurait compris l’imminence de mon coup de pied au cul.
Parce que c’est sûr qu’il va pas se passer une minute avant que j’envoie le bout de mon pied ici présent se heurter contre la destination attendu de son postérieur. Je peux le garantir.
Mais attention, moi je suis pas un mauvais bougre, j’explique pour éviter les heurts… Je préfère ne pas frapper, mais c’est juste que quand je suis face à un truc comme, ça je me sens obligé de causer… Et je dis « un truc » parce que je sais pas ce que c’est : ça a deux jambes et deux bras, c’est vrai, mais allez pas me dire non plus que c’est un bonhomme…
J’épargne les détails sur la caboche, c’est mieux pour vous et pour moi, et c’est tellement dévasté que c’est comme de regarder un cadavre se faire ronger par des vers, ça coupe l’appétit, mais le reste, voyez, c’est pas une lumière et encore là c’est, c’est…un euphémisme. Et je suis gentil, même mon chien il comprend quand je lui dis de partir.
Quand c’est plus con qu’un bestio c’est triste à dire mais c’est qu’on est face à un bidule, un machin…ou alors à la limite, à un insecte… Du genre un gros cafard dégueulasse, d’ailleurs on retrouve quelque chose dans le regard… sauf que le cafard, même lui, il sait quand il faut dégager. Non c’est malheureux, mais la chose à laquelle il me fait penser, et je dis pas juste ça pour ce qui est de l’odeur immonde qui lui sort de la gueule, mais c’est à une grosse bouse de vache, une défécation qui traîne sur mon jardin et qu’il va falloir que je vire.
Alors me voilà maintenant confronté à un choix cornélien, j’ai promis de cogner là-dedans mais moi, comme à chaque fois que je suis face à une grosse merde, j’ai pas trop envie de m’en approcher. Non je crois que j’ai pas d’autre choix que de gicler ça à coup de pelle…

Nevermore 3

le 01/01/1970 à 01h 33min 29s

Je t’ai vu les yeux brouillés de larmes
Et je t’ai cru belle
En toi mille feux que mon désespoir rendaient plus vifs
Je planais avec l’image lointaine et jolie de ce pauvre corps maigre près de moi

Je te rêvais parler mais tu ne prononçais pas de mots,
Jérémiades, gémissements, jappements
Cancanages, critiques, papotages
La stridence de ta voix rappelait celle d’un téléphone

Un jour que nous marchions main dans la main,
Au beau milieu d’une rue remplie par la foule
Je me suis endormi, là debout en pleine cohue
Puis me suis réveillé, le cœur léger, l’âme libre
Libéré

Enfin je t’avais abandonné par toi.

La bête

le 01/01/1970 à 01h 33min 29s
des yeux ennemis

Tu les as tout de suite remarqués.

D'abord tu ne les as pas vu, tu les as sentis.
Quelque part pas loin de toi
Lourds comme la mort.
Du parfum de la violence.
Ces yeux noirs.
L’envie de tuer est un cri silencieux
Qu’accompagne le vacarme muet du danger
Un regard dont l’éclat maléfique ne trompe guère.
Tout, parfois, se joue à une ombre au fond d’un regard au fond d’une pièce...
Deux yeux ennemis...




tsuka

Puis tu as vu le sabre.
La tsuba
Grossièrement travaillée
Artificielle.

Tu as entendu qu’on peut juger un sabreur à la garde de son ken,
Que la qualité et l’attention portées à cette partie de l’arme
Témoigne du respect porté envers l’ennemi puisque c’est la dernière chose qu’il verra avant de mourir,
Et que le respect porté envers l’ennemi témoigne justement de la qualité de sa maîtrise des armes.
Donner la chance d’apprécier une ultime fois
La beauté d’un moment
Est une noble cause.
Mais ce battre n’a rien à voir.
Se battre consiste à lutter pour survivre et
Survivre revient à lâcher la bribe de la bête qui sommeille quelque part au fond du fond
Dans le calme de la coupe,
Dans la netteté du geste su,
Dans le dépouillement de la lame dans le geste.
La fureur canalisée
L’agressivité plutôt que la violence
La bête dressée
La bête domestiquée
Mais la bête quand même, attendant que son maître s’endorme pour finir de le dévorer.

Ta main descend sur la tsuka de ton sabre
Ton ennemi est un rocher qui n’a pas connu le diamant.



poignet

La main,
L’angle du poignet,
La main qui saisit la tsuka en son centre,
Le poignet trop fragile qui a du mal à soulever le poids de l’arme.

Ton adversaire tient son sabre d’une manière singulière.
Tu ne comprends pas.
L’évidence de sa vulnérabilité finit par en devenir suspecte.
Malgré toi,
Comme toujours,
Tu sens la peur mouiller tes mains



fleurs

Un parfum,
Les fleurs de cerisiers sur les plis du vêtement,
Funeste
Le souvenir de l'odeur du sang,
Des images rapides qui se bousculent

La bête s’éveille doucement



samou11

L’éclat de la lame te remue, tu sens monter en toi l’afflux de sang
Tes doigts se resserrent autour de la tsuka
Contre la tsuba

Avant le prochain battement de ton cœur
Tout sera fini



samou10

La lame s’allume brille
Dans le parfum des fleurs
L’appel du fer aux corps chaud, le sang doit couler
Le sang va couler



samou7

L’ombre des yeux ennemis
File en toi
Irrigue ton sang
Cours dans ton cœur
Parcours ton corps
Cueille le bout de tes doigts et les poussent
A se préparer à sortir ton arme de son fourreau
La haine monte en toi
Puissante



plis

Les coups du cœur contre ta poitrine
La forme de ton ennemi
Se découpant sur le fond flou
Inutile
Les plis du vêtement
Encore immaculée de son sang




Juste avant de sortir ton sabre
Pour accomplir un geste
Net
Précis
Parfait
Mortel
Censé couper le corps de la femme
Tu aperçois le visage


visage

Celui d’une enfant


visage

Le hobit
La tournure des hanches inoffensive


hobi

La tenue du sabre


fond

Le spectre fantasmé de ton agresseur repasse sous tes yeux avant de disparaître



spectre_meurtre

Tu regardes l’enfant en train de jouer
Ta main quitte la tsuka de ton katana
Tu observes du coin de l’œil la petite fille en train de prendre des postures de guerrier.
Aujourd’hui, alors que les crocs acérés de la bête ne déchirent la peau d’aucun enfant,
les dents de lait d’une petite fille mordillent timidement le corps furieux du monstre.


samourai

Virus Mortel

le 01/01/1970 à 01h 33min 29s


-D'habitude, à cette heure, je regarde les oiseaux voler
C'est bizarre aujourd'hui,
Je n'en vois
AUCUN

-C'est normal
ILS SONT TOUS MORTS

VIRUS MORTEL


-D'habitude, à cette heure, j'attends de pouvoir payer à la caisse. Des foules d'autres "moi" remplissent les rayons du supermarché. Aujourd'hui les volets du magasin sont fermés.
Je ne vois personne.
-C'est normal
TOUT LE MONDE EST MORT


VIRUS MORTEL


-J'ai froid dans le dos!
-Profites-en. Ca veut dire que t'es encore vivant!


L'averse

le 01/01/1970 à 01h 33min 29s

Tu marches dans une rue
Plus tu avances et plus la rue s’allonge
Elle est vide
Il commence à pleuvoir
Tu ne sens pas les gouttes tomber contre ta peau
Tu ne sais pas quels habits tu portes
En fait tu ne sais même pas si tu en as, là sur toi, des habits.



L’averse bat son plein
Tu avances au milieu d’une rue déserte
Aucun bruit de moteur ne vient "entrecouvrir" le chant de la pluie
Aucun phare, aucune lueur ne perce le manteau de l’averse.


Tu es désespérement seul à suivre la route


Tu ne sais pas où tu vas, tu avances, tu marches à allure régulière
Tu penses que tes vêtements, si tu en avais, devraient déjà être trempés
Tu le penses mais tu ne sens toujours rien.


Tu avances et tu imagines ton souffle s’échapper de ta bouche.
Ce doit être le mois de mai
Tu sens la moiteur des jours fériés qu’accompagne le parfum du muguet
Tu aurais une poche et dans cette poche un briquet avec lequel tu jouerais
Impossible de l’allumer avec toute cette eau.


Les vitrines des magasins sont toutes éteintes.
Tu avances dans une rue qui n’a de cesse de s’allonger et tu constates que malgré tes efforts
Tu ne parviens pas à réellement avancer


Tu es toujours au même niveau


La distance qu’il te reste à parcourir pour sortir de la rue s’alllonge à chacun de tes pas
Tu sens dans ton cœur quelque chose comme de la tristesse
Une légère tristesse,


Douce
Teintée de nostalgie,
Coupée à la mélancolie
Agréable au fond
Avec un soupçon de peur


Tu te demandes ce qui se cache derrière les fenêtres éteintes des immeubles
Qui surplombent
La rue vide
Où tu marches
Avec la main enfoncée dans la poche d’un pantalon que tu n’es pas sûr de réellement porter
A jouer avec un briquet qui s’il existe, est inallumable car trop mouillé
Puis tout à coup
Une grosse goutte tombe sur ton visage
Et tu sens
Sans explication
La fraîcheur
Faire tressaillir ta peau


Tes machoires se contractent
Tes yeux se plissent
Pendant un instant tu es convaincu que la rue
Va reprendre son activité normale
Tu fermes les paupières et entends le fourmillement de la foule
Puis les rouvres


Juste le chant de la pluie
Par terre et sur les toits


Ton pied s’enfonce dans une flaque d’eau
Ta cheville, ton genou, toute ta jambe
Ton corps entier
Ta tête glisse dans la flaque


Tu te noies


En silence
Te débats tranquillement et
Quand tu parviens enfin à t’extraire
Tu ne te souviens de rien


Plus de rien


Tu es debout

L’averse bat son plein
Tu avances au milieu d’une rue déserte



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